Le Mejdoub de Ksar El-Kébir

Publié le 23 Septembre 2010

Le rôle du poète dans l'ancienne société marocaine est considérable. Il est avant tout le chroniqueur, l"historien" de sa tribu. Il ne chante pas seulement ses amours et ses déboires propres, mais aussi et surtout les événements vécus au sein de sa tribu. Au cours d'une joute entre clans rivaux, c'est à lui que l'on fait appel pour prendre la défense des siens. Respecté et vénéré à l'égal d'un saint, sa parole est écoutée, car il possède la sagesse et le secret des mots qui vont droit au cœur.

Le Mejdoub (majdoub)  (le ravi, l'illuminé) est le surnom que l'on a donné au 16ème siècle, au fondateur de la confrérie des Ouled Mejdoub qui vivait dans la région de Ksar El Kebir au Maroc. Pour comprendre le pourquoi, de son nom, il faut revenir à la notion du Jebd. Lors des lila des confréries issues du soufisme populaire, on dit en darija Taïjdbeb.

Les jdoub sont les personnes qui désignent les danseurs qui pratiquent cette jebda. Mais si la personne conserve sa vie cet état de manière permanente, on dira qu'il est un mejdoub.

Le mejdoub de Ksar El Kébir pratiquait la divination, nous sous la forme de consultations publiques et de voyance, mais comme une prophétie populaire.

Certains quatrains attribué à ce Mejdoub étaient d'un étonnant engagement, ayant des répercussions dans la sphère politique de la société marocaine de l'époque.

En 1985, De Prémare, a démontré qu'il s'apparentait au meddeh maghrébin dont le rôle est de chanter, selon la forme poétique du melhoun. Il le décrit de la sorte : "Gamin épileptique, ou jeune homme surpris par l'irruption de l'extase mystique ? Malâmati exalté et secrètement affilié à ne secte d'action politico-religieuse, ou respectable cheikh d'une zaouïa campagnarde ? Misérable trublion d'El Qsar, ou missionnaire d'un courant soufi en pleine expansion ? Saint ou simulateur ? Barde populaire ou compositeur inspiré d'un dikhr ? Sidi Abderrahman fut sans doute tout cela à la fois suivant les époques de sa vie...ou suivant la manière dont on le considéra, dont on le récupéra. Ce type de personnage est, de toute façon profondément enraciné dans le terroir marocain, dans ses ramifications sociales, dans son entourage mental"

Tayeb Saddiki,  a redonné une dimension d'actualité à ce poète maghrébin dont l'œuvre est sauvée grâce à quelques recueils et monographies qui étaient pourtant tombés en désuétude. Un ouvrage intitulé  «Klame El Ghiwane», reprend ses meilleurs poèmes, un film narre le parcours de le troubadour qu'il fut. Il a fait l'objet de nombreuse études, thèses universitaires dans les plus grands instituts de recherche internationaux.

Cinq siècles après la mort ce conteur et troubadour infatigable fascine toujours autant par sa personnalité que par sa poésie.

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Qasida de Rubaïyat de Cheikh Abderrahmane Al Majdoub

 

Voir aussi

Bibliographie
  • A.-L. de Premare, Sidi abd-er-rahman el-mejdub, éditions du C.N.R.S., Paris, 1985, 300 pp.
  • A.L. de Prémare, La Tradition orale du Mejdub: récits et quatrains inédits,recueillis, transcrits, traduits et annotés par A.L. de Prémare. Aix-en-Provence: Edisud, 1986.
  • Alfred-Louis de Premare, Sidi Abd-er-Rahman el-Mejdub: Mysticisme populaire, société et pouvoir au Maroc au 16e siecle (Les Cahiers du C.R.E.S.M) (Broché), 27 septembre 1985
  • J. Scelles-Millie et B. Khelifa "Les quatrains de Medjoub le sarcastique" poète maghrébin du XVIe siècle , G.P. Maisonneuve et Larosse, Paris 1966 (Réédition).
  • On proverbs derived from the poems of Mejdoub: M. Ben Cheneb "Proverbes arabes de l'Algérie et du Maghreb" (1900).

Rédigé par Last Night in Orient

Publié dans #melhoun marocain

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