Georges Lapassade

Publié le 20 Janvier 2010

Georges Lapassade (né le 10 mai 1924 à Arbus, dans le Béarn-décédé le 30 juillet 2008 à Stains) fut un philosophe et un sociologue français. Il s'intéresse à la psychanalyse et a fait deux analyses, une avec Elsa Breuer et l'autre avec Jean Laplanche, à la biologie (il travaille avec Georges Canguilhem). Il participe à la revue Arguments dirigée par Kostas Axelos et Edgar Morin et s’intéresse à la psychothérapie institutionnelle. Il reprend à Félix Guattari le syntagme « analyse institutionnelle » pour désigner une sociologie d’intervention, avec la collaboration de René Lourau. Il est une des figures de proue de la psychosociologie, de l’ethnologie et de la pédagogie. Ses actions en milieu estudiantin durant les années 1958-1968 ont eu un impact important dans l'avènement des évènements de Mai 1968. Il introduit en France, l’ethnométhodologie. Il demeure le premier sociologue français à avoir travaillé sur le rap et sa culture.

 

Si le folklore appartient au passé des sociétés industrielles, au Maroc, il reste encore une réalité vivante : chaque ethnie, voire chaque profession dispose d'une sous culture qui lui est propre. C'est le programme de recherche dénommé « Paroles d'Essaouira », en tant que « Carrefour culturel », que Georges Lapassade avait lancé en 1980 et qui visait à recueillir et à analyser, les chants des moissonneurs, des artisans, des marins, des confréries religieuses, des femmes, des comptines d'enfants...Ce théoricien de l'autogestion, qui dans son ouvrage Groupes, organisations et institutions (1966), dénonce l'inertie et le conformisme des appareils bureaucratiques tout en essayant de penser les conditions de leur "révolution permanente", fut un infatigable agitateur "antimandarinal" de l'institution universitaire, toujours du côté des étudiants (surtout contestataires) plutôt que de sa hiérarchie ou même de ses pairs. Après s'être investi dans les mouvements d'avant-garde des années 1950 à Saint-Germain-des-Prés puis, entre autres, avoir joué un rôle important en 1963 dans le tournant "gauchiste" de l'UNEF, Mai 68 le voit participer activement à l'occupation de la Sorbonne, et fonder le CRAC (Comité révolutionnaire d'agitation culturelle), avant qu'on le retrouve au côté des contestataires durant les manifestations qui émaillèrent l'été des festivals.

GEORGE-LAPASSADE.JPG

Georges Lapassade et maâlem Omar Hayat, en 1979

 

La première direction prise, quand Georges rencontre, en 1965, en Tunisie, la musique noire du stambali, manifeste bien les options sous-jacentes. Impressionné par cette musique véritable moyen d' expression de gens deshérités, opprimés, exclus, il s’intéresse d'abord à la musique, qu’il veut transporter partout. Mais très vite, il se rend compte que cette musique débouche sur des états de transe, qu'il met immédiatement en correspondance avec les pratiques de groupe. Il se penche plus particulièrement sur les phénomènes de la transe. Il s'intéressait, enquêtait et écrivait sur la culture marocaine dans toute sa diversité. Les rituels des confréries (Hamadcha, AissawaGnawa, Ganga, Regraga...), les musiques profanes ou religieuses (amerg, awach, rzoun, aita, malhoun...), les fêtes locales (achoura, daour des Regraga et autres moussems, notamment chez les Izinghen…), même l'histoire ancienne d'Essaouira et finalement ses artistes-peintres, tous ces sujets ont fait l'objet d'études et d'écrits de sa part. Il a publié un nombre impressionnant d'ouvrages scientifiques et d'articles à caractère ethnographique mettant en valeur le patrimoine culturel et la musique à Essaouira. Dans cette ville tout le monde s'accorde à reconnaître le rôle déterminant joué par cet homme dans la valorisation du patrimoine culturel gnawa de cette ville qui est le résultat d’un long processus de mise en valeur mené depuis la fin des années 60 par lui même. En effet, en 1969 Georges Lapassade publie son premier article sur les Gnawa d’Essaouira dans "Lamalif". 30 années après, il dirige, sur les lieux même à Essaouira, une thèse de doctorat sur le même sujet. Durant cette période, il s'attachera à comprendre et à élucider ce qu'il appelle "Le statut particulier du gnaouisme souiri". Il participe en collaboration avec Feu Boujemaâ Lakhdar, à l’organisation des premiers voyages des Gnaoua d’Essaouira en dehors des frontières marocaine, contribuant ainsi à donner une dimension internationale à cette confrérie. Sous la direction de Georges Lapassade, ce dernier prépare une maîtrise sur l'enseignement de l'incrustation à Essaouira. Très proche des confréries populaires, Boujemaâ Lakhdar participe aux soirées de musique et de transe. Il se livre en même temps à un travail d'ethnologue, prend des notes, assemble des renseignements. Lapassade se souvient que « c'était sa manière de pratiquer l'ethnologie, non pas comme un observateur extérieur des rituels, mais au contraire comme un participant qui les vivait de l'intérieur ».

On peut de ce fait penser que les habitants des cités environnant Paris-8 qui venaient témoigner dans ses cours de l'histoire du rap, enregistrer dans un studio de fortune de la faculté ou simplement échanger avec les étudiants à l'époque (1989-1991) où il put animer un groupe d'étude sur la "culture hip-hop et communication " (car il fut aussi le premier sociologue à écrire sur les "jeune de banlieue" , notamment sur le rap dans Le Rap ou la fureur de dire, éd. Louis Talmart, 1990) lui rendirent sans doute le meilleur des hommages en le surnommant alors :« le jeune vieux ».

 

Œuvres

Recherches institutionnelles
  • L'Analyseur et l'Analyste, Gauthiers-Villars, 1971
  • L'Autogestion pédagogique, Gauthiers-Villars, 1971
  • Groupes, organisations, institutions, Gauthiers-Villars, 1975
  • Socianalyse et potentiel humain, Gauthiers-Villars, 1975
Essais
  • L'Entrée dans la vie, Minuit, 1963 - Il s'agit de sa thèse d'État.
  • Le Livre fou, Épi, 1971
  • Clefs pour la sociologie (en collaboration avec René Lourau), Seghers, 1971
  • La Bio-énergie, Delarge 1974
  • Essai sur la transe, Éditions universitaires, 1976
  • avec Georges Canguilhem, Jean Piquerol, Jacques Ulmann, Du développement à l’évolution au XIXe siècle, 1962, Paris, PUF/Quadrige, 2003
  • Le Corps interdit (en collaboration avec René Schérer), E.S.F., 1977
  • Le Rap
  • Les États modifiés de la conscience, PUF, Paris, 1987,
  • La Transe, Que sais-je ? PUF, 1990
Récits
  • Le Bordel andalou, L'Herne, 1971
  • L'Arpenteur, Épi, 1971
  • Les Chevaux du diable, Delarge, 1974
  • Joyeux tropiques, Stock, 1978
  • L'autobiographe, Duculot, 1980
  • La Dissociation

     

Source

Rédigé par Last Night in Orient

Publié dans #Musiques marocaines

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article